Le facteur clé expliquant cette reprise en « V » des marchés boursiers est sans doute le regain d’optimisme des investisseurs à la succession d’annonces suite de la monétaires et fiscales sans précédent, conjuguée à une décélération de la propagation du virus. De ce fait, notre indicateur de sentiment est sorti du territoire de pessimisme extrême le 10 avril. La question est : est-il prématuré de la part des marchés d'anticiper une victoire imminente dans la guerre contre la COVID-19 ?
Liste d’éléments clés
Afin de conclure si le pire est derrière nous, nous revisitons notre liste d’éléments clés à observer, tel qu’introduit le 18 mars. Spécifiquement :
- Des mesures fiscales concrètes visant à aider les travailleurs et les entreprises. Le plan budgétaire de 2000 milliards de $US – incluant des transferts et prêts directs aux travailleurs et entreprises affectés – est le plus ambitieux jamais proposé de l’histoire des États-Unis. Des mesures comparables s’observent dans la plupart des pays développés, incluant au Canada.
- Un fléchissement du taux de croissance mondial des nouveaux cas de Covid-19. Le nombre de nouveaux cas plafonne dans la zone euro, ce qui indique que le pire est probablement derrière eux. Plusieurs signes encourageants ressortent également aux États-Unis, où la stabilité du ratio entre le nombre de gens testés positifs sur la quantité de tests administrés au cours des deux dernières semaines font foi d’une situation de plus en plus sous contrôle. L’expérience de l’Italie laisse également présager une amélioration soutenue au sud de la frontière dans les prochains jours. Dans l’ensemble, bien que la propagation ne soit pas terminée et que le risque de seconde vague demeure, le taux de croissance mondial des nouveaux cas est indéniablement en fléchissement.
- Clarifications des fondamentaux de l'offre et de la demande de pétrole brut. L’entente entre les pays de l’OPEP et les pays du G20 annoncée au cours de la fin de semaine marque la fin de la « guerre de prix » et clarifie donc, en partie, les fondamentaux du pétrole. Toutefois, l’incertitude entourant la faculté/volonté de certains pays à respecter leurs engagements, l’ampleur du déficit de demande et la capacité d’inventaire limitée laisse présager une poursuite des difficultés pour les prix à court terme. D’ailleurs, les cours du WTI demeurent près de leur creux malgré les récentes annonces.
- Rétablissement du flux de crédit pour les ménages et les entreprises. La série de mesures colossales annoncées par la Réserve fédérale et récemment bonifiée pour inclure les titres à plus faible cote de crédit témoigne d’une volonté de maintenir à flot le flux de crédit quasi sans limites de la part de la plus importante banque centrale. Par conséquent, les jauges de risque de crédit et de liquidité, bien que naturellement plus élevées qu’en temps normal, se sont apaisées dans les derniers jours.
- Consolidation du marché boursier autour des niveaux actuels. Dans l’ensemble, plusieurs indices boursiers montrent des signes de consolidation, mais l’approche de certaines moyennes mobiles – notamment pour le VIX qui est assis sur sa moyenne 50 jours et le S&P 500 qui devrait y arriver bientôt – représente un test important pour la suite des choses.
La conclusion
La guerre contre COVID-19 n'est évidemment pas terminée, car seul le développement d'un vaccin (peu probable cette année) permettrait au monde de clamer la victoire. Toutefois, aucun des cinq éléments clés de notre liste n’est au rouge ce qui suggère que le pire de cette crise historique est derrière nous. Maintenant, est-ce que cela veut dire qu’il est temps d’augmenter le risque des portefeuilles en orientant leurs allocations en faveur des marchés boursiers ?
Sur un horizon long terme (>12 mois), nous continuons de croire que les perspectives de rendement des actions se comparent avantageusement aux obligations plus sûres. C’est ce que nous affirmons le 18 mars dernier en concluant que la situation actuelle représentait plus une opportunité qu’une menace, et cela est d’autant vrai maintenant que nous nous sommes éloignés des scénarios plus catastrophistes. D’ailleurs, la prime de risque espérée des actions se tient toujours près d’un sommet en huit ans.
À plus court-terme (horizon <3 mois), nous continuons de prêché par excès de prudence. L’ampleur et la rapidité du rebond boursier devront passer le test de la saison des bénéfices qui s’amorce, celle-ci devant mettre l’accent sur l’impact actuel et potentiel de la pandémie plutôt que sur les résultats du T1-2020, tel que demandé par la Securities and Exchange Commission (SEC). Cela risque de nuire aux espoirs de vive reprise économique que semble escompter la bourse et ainsi fournir un point d’entrée plus attrayant sur le plan tactique. À suivre.