(Traduction du balado enregistré en anglais) 
Martin Lefebvre
Bonjour à tous et à toutes. Bienvenue et merci de vous joindre à ce balado BNI. Au micro, Martin Lefebvre, chef des placements chez Banque Nationale Investissements. Aujourd’hui, nous parlerons de la montée en puissance des FNB gérés activement, un sujet d’actualité et de grande importance puisque BNI lance 20 nouveaux FNB en septembre.
Nous le ferons en compagnie de Tiffany Zhang, directrice, Recherche sur les FNB et les produits financiers, Banque Nationale Marchés des capitaux. Bienvenue, Tiffany. Merci infiniment de l’invitation. Tiffany, j’apprends que vous fêtez vos 10 ans à la Banque. Félicitations!
Tiffany Zhang
Merci. C’est très gentil. Je n’arrive pas à croire que cela fait déjà 10 ans.
Martin Lefebvre
Le temps file. Avant d’entrer dans le vif du sujet, pouvez-vous nous parler de l’importance de votre rôle dans l’évolution de l’équipe de recherche sur les FNB au cours de la dernière décennie?
Tiffany Zhang
Absolument. Ce que nous faisons à la recherche sur les FNB me passionne. Je me suis jointe au groupe le 31 août 2015, il y a 10 ans exactement, et j’ai eu le bonheur d’atterrir dans l’équipe où j’ai commencé comme analyste associée, directement après ma maîtrise en finances. Et au fil du temps, j’ai accepté des fonctions plus importantes et mon équipe est passée de trois à cinq personnes.
Honnêtement, travailler aux côtés de collègues aussi talentueux, au sein de l’équipe et à la Banque, inspire l’humilité. Et comme vous le dites, Martin, le secteur des FNB a évolué de manière spectaculaire au cours de la dernière décennie et nous avons constamment été occupés à répondre aux questions des clients et produire des rapports qui tiennent nos lecteurs au courant de l’évolution du secteur des FNB. Et chaque jour, nous devons acquérir beaucoup de nouvelles connaissances pour assimiler les nouveaux produits qui sont de plus en plus sophistiqués. Et c’est ce qu’il y a de vraiment intéressant dans ma fonction. Cela fait beaucoup, mais en rétrospective je me sens comblée de savoir que, grâce aux efforts de notre équipe, nous avons aidé tant de clients.
Martin Lefebvre
Tiffany, vous avez mentionné la croissance du créneau des FNB au Canada et dans le monde. Parlons plus précisément des FNB gérés activement au pays. Pouvez-vous nous dire quels facteurs ont contribué à la croissance explosive de ces dernières années et peut-être ce qui motive cette hausse de popularité?
Tiffany Zhang
Certainement. Nous suivons de très près la croissance des FNB, et notamment de ceux gérés activement. Il y a des FNB gérés activement au Canada depuis 20 ans au moins déjà. Ce n’est pas une nouveauté, mais au cours des trois à cinq dernières années la croissance des FNB gérés activement a accéléré au Canada à un point tel que, sur l’ensemble des produits, plus de 50 % sont maintenant gérés activement ou basés sur des règles. Ils ne suivent pas des indices publiés. Et c’est pareil aux États-Unis. Je pense que tant la demande que l’offre expliquent l’expansion des FNB gérés activement. Du côté de la demande, quand j’ai commencé, la plupart des investisseurs utilisaient les FNB de manière passive. Les FNB étaient pratiquement synonymes d’investissements passifs. Les investisseurs les utilisent pour se donner une exposition passive aux actions canadiennes, américaines et mondiales. Et ils utilisent aussi des FNB de titres à revenu fixe passifs pour une exposition à des obligations principalement canadiennes. Mais avec le temps, la demande des investisseurs a évolué et ils ont exigé plus qu’une simple exposition passive.
Il y a aussi une demande de diversification mondiale et de distributions élevées et fiscalement efficaces ainsi que d’assurance des portefeuilles et de protection contre des baisses, en plus de certaines catégories d’actifs spécialisés ou répondant à des thèmes particuliers. Toutes ces demandes, on peut mieux les satisfaire avec des FNB à gestion active, qui sont plus souples. Et du côté de l’offre, nous avons un marché très concurrentiel. Nous avons 44 émetteurs de FNB au Canada actuellement, et bientôt 46. Sun Life et Capstone ont déposé des prospectus provisoires pour lancer des FNB au Canada. D’ici la fin de l’année, nous aurons probablement au moins 46 émetteurs de FNB au Canada. Et aux États-Unis, ils appellent cela un « terrordome ». Au Canada, nous n’en sommes pas encore là. Mais, le marché est très concurrentiel. Pour se différencier, le simple lancement d’un autre FNB basé sur l’indice S&P 500 pour ne pas être en reste ne mobiliserait pas beaucoup d’actifs. Ce que nous voyons les émetteurs de FNB faire, c’est lancer des séries FNB de fonds communs de placement ou des FNB individuels qui répliquent les stratégies existantes de leurs fonds communs de placement en s’appuyant sur leurs gestionnaires de portefeuille vedettes ou sur des stratégies couronnées de succès déjà très demandées ou populaires pour que leurs produits se démarquent.
Je pense que c’est le besoin des émetteurs de FNB de se distinguer et la demande des investisseurs qui deviennent plus sophistiqués qui créent un environnement parfait pour l’adoption rapide des FNB gérés activement.
Martin Lefebvre
Vous avez dit que la demande est passée des FNB passifs à ceux gérés activement, et avez mentionné que, pour le moment, la plupart de ceux-ci sont des transferts de fonds communs de placement gérés activement aux FNB. Quelles sont les autres tendances actuelles des FNB à gestion active? Que voyez-vous? Qu’est-ce qui est en vogue actuellement?
Tiffany Zhang
Plusieurs tendances différentes émergent. Je peux parler de l’une d’elles maintenant et nous reviendrons sur les autres plus tard. Ce que je constate actuellement, c’est que la frontière entre la gestion active et les fonds passifs s’estompe de plus en plus. Je sais que nous parlons de gestion active, Martin, et tout cet épisode porte sur ce sujet, mais je crois que la distinction entre actif et passif n’est pas tout quand on sélectionne des produits parmi les FNB. Je m’explique. Pour les FNB à gestion active, on se repose de plus en plus sur des FNB passifs comme sous-jacents.
Deux exemples au Canada : deux des catégories de FNB à gestion active les plus importantes sont les FNB à répartition des actifs et les FNB à stratégie d’options. Ils représentent plus de 40 % du paysage des FNB à gestion active. Pour ces FNB, les portefeuilles sous-jacents sont souvent des FNB passifs qui répliquent un indice. Et pour les FNB à répartition d’actifs, le gestionnaire de portefeuille a un pouvoir discrétionnaire sur le moment des rééquilibrages, les produits à utiliser et la façon de procéder au rééquilibrage. Et pour les FNB basés sur des options, le gestionnaire de portefeuille gère activement le programme de vente d’options pour offrir une distribution élevée et fiscalement efficace aux clients. La gestion active devient alors plus passive. Et du côté passif, on dit que l’indexation est une série de décisions actives. Il y a toujours eu un élément de gestion active, même du côté des FNB indiciels, mais je pense que celui-ci commence à paraître plus actif parce que l’indexation devient plus compliquée. Je pense qu’en ce qui concerne les indices, ils doivent maintenant s’en remettre davantage au jugement et à l’expertise d’humains pour bien définir l’univers d’investissement puis fixer les critères de ce qui est à inclure dans le portefeuille et même pour la tenue à jour continue. Je vais vous donner un exemple. Nous avons plusieurs FNB indiciels adossés à l’intelligence artificielle au Canada et aux États-Unis. Mais quand on y regarde de plus près et qu’on en examine les sous-jacents, ils paraissent très différents. Ils ne ressemblent pas à des FNB relevant de cette catégorie du tout. La raison en est que, dans la phase de conception de l’indice, les analystes de différents producteurs d’indices ont des critères différents ou une définition différente de ce qu’est l’IA et des critères et méthodes à utiliser pour sélectionner des sociétés d’IA. Ils doivent surveiller l’indice sur une base continue pour que leur cahier des charges de construction de l’indice demeure à jour et pertinent. Sinon, ils doivent procéder à des modifications. Cela me semble très actif. Toutes ces nuances impliquent que, quand un client vient nous voir, nous ne commençons généralement pas par une distinction entre gestion active et passive. Nous étudions plutôt d’abord quelle exposition le client recherche puis nous apparions cela avec les FNB souhaités, et ensuite nous prenons des mesures supplémentaires dans l’analyse des FNB et enfin nous présentons au client une variété d’options.
Martin Lefebvre
Vous avez mentionné l’exposition et peut-être la diversification. Vous avez aussi mentionné des stratégies d’options. Voyez-vous arriver dans l’espace des FNB plus de catégories d’actifs alternatifs comme peut-être le crédit privé ou les actifs réels? Est-ce que celles-ci gagnent en popularité?
Tiffany Zhang
C’est effectivement le cas. Nous avons quelques FNB au Canada et aux États-Unis qui incluent déjà certains de ces types d’investissement plus alternatifs, peu liquides dans leurs portefeuilles. Bien entendu, ceux-ci doivent respecter les limites d’illiquidité, c’est-à-dire qu’ils doivent limiter ces investissements illiquides à un maximum de 10 % à 15 % du portefeuille. Mais ce genre de produits arrive sur le marché. Et je ne serais pas surprise d’en voir de plus en plus. J’ai lu des articles sur la diminution du nombre d’actions cotées aux États-Unis qui a baissé d’un pic de 8 000 dans les années 1990 à plus de 4 000 maintenant. Cela s’explique par l’expansion des placements privés. Cela comble aussi la demande de crédit privé, qui a fortement augmenté sur le marché jusqu’à près de 2 000 milliards $ d’actifs sous gestion dans le monde. Si notre marché collectif devient plus privé, ce genre d’investissements finira par aboutir dans des FNB. Mais cela n’ira pas sans difficulté. Je pense que la transparence et la liquidité sont les plus grands défis pour ces genres de FNB. En attendant qu’un FNB puisse trouver beaucoup d’acheteurs et de vendeurs naturels sur le marché secondaire, l’écart entre leurs cours acheteurs et vendeurs est en grande partie déterminé par la liquidité sous-jacente. Plus les sous-jacents sont illiquides, plus l’écart entre cours acheteurs et vendeurs est grand pour les FNB. Je pense que la disponibilité de ces FNB sera limitée par la possibilité pour les mainteneurs de marché de trouver des substituts liquides pour, par exemple, une autoroute à péage ou un aéroport, ou certains prêts privés. Mais on trouve des FNB aux États-Unis qui incluent des placements privés. Un de ces FNB, XOVR, avait dans son portefeuille SpaceX et a, depuis, attiré quelques centaines de millions de dollars d’investissements. Un autre FNB de State Street a inclus du crédit privé dans le portefeuille ce qui a aussi suscité de l’intérêt. Assurément, les fournisseurs de FNB essaient d’offrir des innovations dans ce domaine, mais étant donné toutes les contraintes, je pense que ce sera probablement un petit composant dans le paysage des FNB.
Martin Lefebvre
Tiffany, revenons à la construction d’un portefeuille et parlons un peu plus de diversification. Quel type de rôle voyez-vous pour les FNB à gestion active dans la diversification des portefeuilles?
Tiffany Zhang
Très bonne question. Nous voyons aussi bien les FNB passifs que ceux à gestion active offrir un avantage de diversification au portefeuille, mais plus encore pour les FNB à gestion active parce qu’ils ont accès à des débouchés plus vastes. Ce que nous constatons cette année c’est que les investisseurs affectent de plus en plus leur capital à des actions internationales et des titres à revenu fixe par le biais de FNB passifs et à gestion active. Je sais, Martin, que, au bureau du chef des placements, votre équipe recommande d’augmenter l’exposition à la région EAEO depuis quelque temps, qui représente les actions les plus performantes par rapport au reste du monde. Je pense que ce qui se passe dans l’espace des FNB est que les investisseurs en FNB se sont exagérément concentrés ces 10 ou 15 dernières années sur les actions américaines, qui étaient vraiment la catégorie d’actifs la plus performante. Mais soudainement cette année, le dollar américain se déprécie, freinant les rendements, et l’exceptionnalisme des États-Unis est aussi remis en cause. Il y a eu la chute en avril à cause des droits de douane. Subitement, les investisseurs ont compris qu’ils devaient se diversifier en dehors des États-Unis, et ils augmentent leurs positions en titres internationaux par le biais de FNB. Et je crois que pour l’exposition aux actions ou titres à revenu fixe internationaux, les FNB sont un outil réellement important parce que, sans FNB ou fonds à gestion active, il faut choisir entre deux voies distinctes. D’un côté, il faut être son propre gestionnaire de portefeuille actif. De l’autre, il faut être entièrement passif. Parlons de ces deux voies. Dans la première, on peut être son propre gestionnaire de portefeuille. Certes, je peux gérer mon propre portefeuille d’actions qui pourraient être nord-américaines, mais mon portefeuille aura un fort penchant canadien et une forte concentration sectorielle et est limité par ma vision du monde. Et je ne serais pas à l’aise pour m’aventurer hors de l’Amérique du Nord pour acheter par exemple un titre japonais ou des sociétés françaises parce que je ne connais pas du tout certaines d’entre elles, sans parler de la gestion de toutes les devises et des implications en termes de retenue d’impôt dans l’investissement international. La deuxième voie est celle de l’investissement entièrement passif. Il y a des clients qui utilisent des FNB entièrement passifs pour leurs investissements internationaux, mais je pense que cela soulève certaines préoccupations et des risques. Nous parlons de concentration de l’indice boursier américain, les dix premiers titres du S&P 500 représentant 30 % de la catégorie. Mais quand on considère d’autres pays comme le Royaume-Uni, l’Allemagne ou la France, la proportion de leurs 10 principaux titres dans la catégorie est encore plus forte et la concentration sectorielle est plus grande qu’aux États-Unis. Certains clients s’en inquiètent vraiment, et ils préfèrent une gestion active pour leur exposition internationale. Quant aux titres à revenu fixe, la gestion est principalement active car il faut gérer l’exposition à différents genres d’obligations et la répartir entre différents pays en fonction de leur courbe des rendements et de la situation de leur devise. Et nous pouvons parler de revenu fixe, ce qui, je pense, est un énorme secteur de croissance dans le paysage des FNB à gestion active.
Cela dit, je pense que la gestion active est réellement importante, mais il appartient aux investisseurs de procéder à toutes les vérifications préalables appropriées. Et mon équipe est là pour répondre à toutes les questions des clients. Si vous êtes curieux au sujet de l’un de nos produits, n’hésitez pas à vous adresser à nous; nous pouvons vous aider dans la sélection des produits.
Martin Lefebvre
Tiffany, je crois que vous avez clairement expliqué les rôles des FNB à gestion active. Vous avez mentionné plus tôt qu’il y a actuellement plus de 40 fournisseurs. Et comme je l’ai dit en introduction, Banque Nationale Investissements est sur le point de lancer 20 nouveaux FNB gérés activement. Comment se présentera le paysage dans trois à cinq ans d’après vous?
Tiffany Zhang
Il est très difficile de faire des prédictions. Je n’aurais pas prédit que nous aurions autant de FNB à gestion active au Canada et que nous aurions des FNB reposant sur le Bitcoin, les actions scindées, les actions privilégiées, les obligations structurées adossées à des prêts. Toutes ces innovations étonnantes, je ne les aurais pas prédites. Mais je pense que deux tendances sont assez claires. L’une est qu’il se produira un effet de ruissellement dans le paysage des FNB. Ce que je veux dire par là c’est que certaines stratégies ou idées qui sont populaires dans les cercles institutionnels peuvent filtrer vers le secteur de détail par le biais des FNB et vice versa. J’ai mentionné l’exemple des FNB d’obligations structurées adossées à des prêts. Traditionnellement, c’est un actif pour investisseurs institutionnels. Mais nous avons maintenant six émetteurs de FNB qui lancent des FNB d’obligations structurées adossées à des prêts. Et beaucoup d’investisseurs du secteur détail les apprécient beaucoup en raison de leurs taux de distributions élevés et de leur diminution moindre pendant les périodes de repli. Et l’inverse se produit aussi. Les FNB de cryptomonnaie ont traditionnellement été des actifs du secteur détail. La plupart des investisseurs en FBN de cryptomonnaies ou en cryptomonnaie sont des investisseurs du secteur détail. Mais maintenant, beaucoup d’investisseurs institutionnels américains, des fonds de retraite d’État et des fonds de dotation ou de grands bureaux de gestion familiale et différents genres de sociétés de conseil ont adopté les FNB de cryptomonnaie inscrits à la cote aux États-Unis.
Je pense que les FNB démocratisent l’accès aux idées d’investissement. Tout ce qui est populaire dans une partie du monde des finances sera probablement repris dans un FNB et livré aux autres participants du marché. Une autre tendance qui se produira probablement sera celle d’une adoption plus large des FNB à gestion active par différents genres d’investisseurs. En ce moment donc, la plupart des investisseurs en FNB à gestion active au Canada sont des clients du secteur détail, les investisseurs en ligne et les conseillers financiers. Mais je crois qu’on a vu des clients institutionnels à l’échelle mondiale utiliser des FNB gérés activement. Un des exemples d’utilisation des FBN serait de permettre l’accès à certaines catégories d’actifs et certains thèmes spécialisés pour lesquels les clients institutionnels n’ont pas d’infrastructure de négociation ou de recherche. Un autre exemple d’utilisation serait pour gérer l’alpha ou les liquidités générées – tous les FNB de trésorerie au Canada sont à gestion active – et par institutions, j’entends certains propriétaires d’actifs comme les caisses de retraite et les compagnies d’assurance, ainsi que des gestionnaires d’actifs qui gèrent leurs fonds en utilisant des FNB. Je crois que, à mesure que le profil de liquidité des FNB canadiens s’améliore et que leurs frais diminuent grâce à l’augmentation de la concurrence, ils gagneront du terrain dans le secteur institutionnel. Je crois que le rythme de croissance des FNB à gestion active et des FNB en général se maintiendra probablement et ne ralentira pas au cours des trois à cinq prochaines années.
Martin Lefebvre
À vous entendre, je pense que l’avenir appartiendra aux FNB et, de toute évidence, les FNB gérés activement y joueront un rôle important. Tiffany, je vous remercie de votre temps. C’était un plaisir de vous accueillir au micro de même que pour ceux qui nous écoutent. Merci d’écouter notre série de balados BNI. Nous nous retrouverons le mois prochain.